Tolérance zéro ou réduction des risques ? Après des décennies de politiques coups de poing contre le tabac, les responsables européens de santé publique se tournent de plus en plus vers une stratégie dite de « réduction des risques ». Son objectif : limiter au maximum la consommation et les impacts négatifs de la consommation de tabac, plutôt que de chercher à l’éradiquer.
Les détracteurs de la stratégie de « réduction des risques » (« Harm Reduction ») estiment dangereux de baisser la garde et de revenir sur la politique de tolérance zéro qui a longtemps prévalu en Europe pour frapper les fumeurs dans leurs consciences et dans leurs porte-monnaies (le paquet à 10 euros s’inscrit dans cette logique).
Pourtant, les partisans d’une approche plus flexible gagnent du terrain à travers l’Europe. En Grande-Bretagne, précurseur dans le domaine, les résultats sont au rendez-vous et le nombre de fumeurs est aujourd’hui deux fois moindre qu’en France ou en Allemagne alors que les taux étaient comparables il y a une dizaine d’années.
Une approche avalisée par plusieurs études, et désormais soutenue par l’essentiel des experts, qui appellent à un réajustement des politiques publiques pour aborder la question du tabac de manière plus pragmatique. En se montrant notamment plus souple à l’égard des substituts à la cigarette comme les e-cigarettes classiques (vape) ou de nouvelle génération (tabac à chauffer). En effet, ces alternatives permettent d’inhaler de la nicotine, mais sans aucune fumée de combustion.
« Les cigarettes électroniques restent intéressantes comme alternative à la cigarette », indique Ute Mons, directeur du centre de recherche allemand contre le cancer. Le professeur Heino Stöver, spécialiste des addictions, abonde dans le même sens quand il explique que « toutes les alternatives aux cigarettes combustibles devraient être considérées comme utiles ».
Au Portugal aussi, la réduction des risques est défendue par les experts, comme la juriste Mafalda Carmona, pour qui « dans un souci de défense de liberté, mais également de santé publique, l’Etat doit s’engager sur une troisième voie (de réduction des risques) et ne pas confondre le problème du tabac avec sa solution. »
A l’image de la Grande-Bretagne et du Portugal, de nombreux pays européens choisissent désormais cette troisième voie. C’est le cas de la République tchèque, de la Grèce, de la Norvège, ou encore de l’Italie. De quoi laisser entrevoir un revirement à long-terme au sein de l’Union européenne où les partisans de la tolérance zéro, France et Allemagne en tête, sont désormais minoritaires.