Le chef de l’État français a explicitement admis pour la première fois, la responsabilité de son pays dans la situation kafkaïenne que traverse la Libye depuis le départ forcé du pouvoir de Kadhafi. Cela marque peut-être un tournant dans le règlement de la crise sécuritaire au Sahel.
C’est une phrase d’à peine une quinze mots, mais qui retentit encore dans les oreilles. Emmanuel Macron a officiellement reconnu en des termes on ne peut plus clairs que l’Occident, dont son pays, avait sans doute contribué à l’instabilité politique et sécuritaire en cours en Libye. « Nous avons une dette envers la Libye, très claire : une décennie de désordre », a déclaré le chef de l’État français, le 23 mars à l’Élysée, recevant une délégation officielle des autorités actuelles de Tripoli.
Pourquoi est-ce une déclaration importante ?
Il s’agit du premier aveu émanant d’un officiel français au pouvoir depuis l’épisode du délogement de Kadhafi par une coalition d’armée occidentale, et sa mort dont les circonstances restent encore bien floues. En effet, depuis le décès de l’ancien président libyen, son pays est plongé dans les abysses du chaos avec plusieurs factions qui se disputent la responsabilité de gouverner. Au plan sécuritaire, cela a grandement contribué à l’installation d’un climat de terreur un peu partout dans la région. Les armes ont été dispersées dans la nature et plusieurs États voisins de la Libye se retrouvent aujourd’hui en proie à la menace jihadiste.
Les dirigeants africains coupables d’avoir subi le déroulé des événements ayant précipité la chute de l’ancien guide libyen, ont à de nombreuses reprises, donné de la voix ces dernières années. Le Tchadien Idriss Déby notamment, a encore accusé récemment la coalition occidentale d’avoir favorisé l’émergence des groupes armés de tous ordres dans la région sahélienne par son intervention en Libye. Un épisode avalisé par l’OTAN sous l’impulsion de la France de Nicolas Sarkozy, alors chef de l’État.
Quelle incidence sur la situation sécuritaire au Sahel ?
Les aveux du président français peuvent-ils participer à améliorer la stratégie sécuritaire au Sahel ? C’est en tout cas le souhait des populations et acteurs de la région. Au Mali notamment où une opération militaire est en cours depuis 2013 sous l’égide de la France, on espère que des mesures fortes et décisives suivront ces propos d’Emmanuel Macron. Quoi que certains spécialistes restent sceptiques sur la sincérité du président français. Il s’agirait avant tout selon eux, d’une opération de communication, en vue de faire regagner à son pays, son influence en Libye.