Les feux en cours à Los Angeles apparaissent comme révélateurs des fragilités du temple mondial du cinéma désormais nostalgique d’un passé glorieux.
Avec les incendies débutés le 7 janvier à Los Angeles, Hollywood connaît un début d’année difficile, avec des tournages suspendus en cascade afin de sauver tout ce qui peut l’être des flammes, dont l’ampleur reste à déterminer très précisément.
Pourtant cette catastrophe consécutive à des choix humains coupables (mauvaise gestion de l’eau, pression démographique, urbanisation problématique, entre autres) n’est à l’évidence, pas la pire des choses auxquelles l’industrie du septième art se trouve confrontée en ce moment.
Frappée par des crises successives comme le Covid (2020-2021) et la longue grève des scénaristes (159 jours) et celle des acteurs (118 jours) en 2023, la profession se retrouve aujourd’hui à l’agonie, avec des acteurs de plus en plus précarisés.
Un nouveau reportage du journal Le Monde dans cette ville de l’État du Sud californien, permet de lever le voile sur un secteur en pleine mutation, exsangue à la fois économiquement et socialement, et dont l’hégémonie historique mondiale s’effrite sous au profit de territoires réputés désormais beaucoup plus attractifs.
La fin d’un âge d’or
À cet effet, les chiffres dévoilés par le quotidien français sont pour le moins évocateurs. Compilés par FilmLA, l’organisme chargé de la délivrance des autorisations de tournage, ils évoquent temps de tournage historiquement bas depuis 30 ans. Soit 23 480 jours en 2024, un niveau comparable uniquement à 2020, lors de la pandémie.
La télé-réalité, autrefois florissante, accuse une chute vertigineuse de 46% des productions à Los Angeles en un an. Il est désormais bien loin ce temps où les professionnels tournaient à plein régime dans le but de satisfaire une demande dopée par les confinements décrétés contre la crise sanitaire.
« J’en faisais une centaine par an. Maintenant, c’est le paradis si j’en ai une par semaine », confie l’acteur Evan Arnold, connu pour avoir joué dans des films comme « The West Wing » ou encore « Close to Home », à propos des auditions devenues rarissimes.
Peu d’éclaircies à l’horizon
« Avant, je finissais le montage d’un show le vendredi et j’en avais un autre dès le lundi« , se souvient pour sa part, Tim Wilsbach, monteur nommé aux prestigieux Eddie Awards 2025. Pour la première fois de sa carrière, il a perdu son assurance santé faute d’avoir cumulé les 400 heures de travail requises sur six mois.
Pour Corey Moore, syndicaliste chargé de la distribution, l’industrie « est encore à la recherche d’un modèle de rentabilité », alors que les productions se tarissent. Il en est de même des studios de plus en plus délocalisés vers des destinations plus attractives sur le plan fiscal, comme l’Irlande, la Hongrie ou l’Australie.
Cette crise structurelle s’accompagne d’une mutation profonde des habitudes de consommation. Comme le souligne Tim Wilsbach, la production d’images par des particuliers sur les réseaux sociaux concurrence désormais directement la création professionnelle.
De fait, les acteurs se demandent à quand le bout du tunnel. « Le métier d’acteur est en train de devenir un hobby, réservé à ceux qui peuvent se l’offrir », cingle Evan Arnold.