France : les créateurs de contenu adulte dans le désarroi

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Plusieurs acteurs pornographiques font part de leur inquiétude suite à la fermeture de certaines plateformes de contenu en France, dans le contexte du différend avec l’État concernant la vérification de l’âge des utilisateurs.

« Je vais avoir une baisse considérable du nombre de vues, et donc de revenu. C’est sûr et certain ». Ces propos de Salomé Cllout dans Le Monde illustrent la crainte partagée par de nombreux acteurs de la pornographie depuis le blocage de Pornhub, RedTube et YouPorn en France.

Ces trois sites de contenu pour adulte, propriétés du groupe Aylo, sont en effet inaccessibles via le territoire français depuis le mercredi 4 juin, sauf en utilisant un VPN (« virtual private network », réseau privé virtuel), outil permettant de masquer sa localisation.

Cette situation découle du refus d’Aylo de se conformer aux exigences françaises en matière de vérification de l’âge des utilisateurs. La société, détenue par le fonds d’investissement canadien Ethical Capital Partners (ECP), dénonce ce dispositif comme une atteinte à la vie privée, le jugeant trop intrusif.

L’invisibilité d’une profession stigmatisée

« On veut toutes que les mineurs n’accèdent pas à nos contenus et qu’ils aient une meilleure éducation sexuelle qui ne passe pas par la pornographie. Mais je ne pense pas que cette loi soit la meilleure méthode pour le faire », estime Carmina, présentée dans le quotidien du soir comme une réalisatrice et actrice de pornographie alternative.

Pour ces entrepreneurs du sexe 2.0 dont le business model repose sur un écosystème fragile où les plateformes gratuites servent de tremplin vers les services premium, il s’agit d’une douche froide.

« Je publie une vidéo sur Pornhub tous les vendredis : c’est mon gagne-pain, ma vitrine« , relève ainsi Khalamité, actrice pornographique lyonnaise forte de 47 millions de vues sur cette plateforme gratuite. En l’espace de 24 heures, son trafic quotidien s’est effondré de 50 000 à 700 visites.

Au-delà des considérations économiques, c’est l’absence de consultation qui indigne la profession. « Personne ne vient nous chercher. On est considérés comme des demeurés », peste Maxime Horns, acteur français.

Un cri dans le désert ?

« Il faudrait une discussion entre Pornhub, l’Arcom et des créateurs qui sont réellement concernés », plaide Salomé Cllout, créatrice de contenus belge dont les trois quarts de l’audience sont français.

Difficile cependant d’envisager une telle issue dans l’immédiat, Aylo et l’État français restant inflexibles sur leurs positions respectives. « Bon débarras », a ainsi lancé Jean-Noël Barrot, ex-secrétaire d’État au numérique devenu ministre des Affaires étrangères et auteur de la loi polémique.

D’autres membres du gouvernement tiennent le même discours. L’Arcom, de son côté, affirme qu’« Aylo a fait le choix de se soustraire à l’impératif de protection des mineurs en suspendant l’accès à ses contenus en France, y compris pour un public majeur, alors qu’il existe de nombreuses solutions techniques permettant de vérifier l’âge des utilisateurs tout en protégeant leurs données personnelles ».

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